Parole d’entrepreneur
octobre 2020
Yannick Curty – Patron à Nantes de La Cigale, Félix, Aristide et Le 1…
Sortant du service militaire après un IUT techniques de commercialisation, Yannick décide de se mettre directement au boulot. Au GAN qui, à l’époque, recrute des jeunes diplômés opérationnels auprès des IUT pour les former au métier nommé « inspecteur de capitalisation », précurseur du conseiller de patrimoine. Après une période initiale de formation Yannick est accompagné par le GAN dans l’acquisition d’un territoire départemental sur lequel il dispose d’une exclusivité de commercialisation des produits financiers de la compagnie auprès d’un portefeuille de clients privés. Avec son statut d’indépendant Yannick est très vite projeté dans un rôle d’entrepreneur dès son premier job. S’en suivra une belle réussite à la tête du département du Maine-et-Loire, avec une équipe de commerciaux et de CGP qui passera de 30 à 60 collaborateurs. Jusqu’au moment où le GAN refuse à Yannick, ambitieux patron de 28 ans, de reprendre un deuxième territoire. Yannick décide alors de quitter le métier de CGP et de racheter une entreprise avec un ami restaurateur nantais qui partage la même envie entrepreneuriale. Ils sautent ensemble sur l’opportunité d’acquérir La Cigale, une brasserie nantaise historique qui est alors au plus bas.
« Le hasard et la chance, le courage et l’inconscience… » nous ont permis en 1982 de démarrer cette nouvelle aventure. Suivront 6 autres acquisitions et 3 cessions, toujours dans la restauration dans des quartiers historiques de Nantes. Le groupe réalise aujourd’hui plus de 11 millions de chiffre d’affaires avec 150 personnes et 4 belles adresses nantaises. Rugbyman en 2ème division avec le SNUC pendant 10 ans, joueur de tennis de compétition, et aujourd’hui skieur nautique émérite Yannick reconnaît que le sport a toujours été une source d’inspiration, notamment pour ses valeurs, et un soutien dans sa vie d’entrepreneur. Il a aussi souhaité rendre localement à sa communauté ce qu’elle lui avait apporté en assumant des responsabilités de juge bénévole auprès du Tribunal de Commerce de Nantes pendant 6 ans, et au sein de l’association des commerçants nantais.
1) Pourquoi être devenu entrepreneur ?
Mes parents étaient commerçants et c’est vrai que j’ai toujours été éduqué dans une culture du travail, du besoin de sortir de sa condition, de faire mieux que la génération précédente. Peut-être aurais-je pu travailler pour un autre, mais il aurait fallu que je rencontre quelqu’un qui m’éblouisse et qui m’inspire.
Au fond, je crois que je ne veux dépendre que de moi-même. Ne devoir mes réussites et mes échecs qu’à moi-même.
Pour entreprendre il faut avoir une bonne estime de soi, bien placée. C’est essentiel pour être capable de faire face aux doutes – raisonnables – tout au long du parcours.
2) Le chef d’entreprise est-il le seul à entreprendre ?
Ma version du vieux dicton « Tant vaut l’homme, tant vaut la terre » serait : « Tant vaut l’homme, tant vaut l’affaire ». Tout succès d’entreprise repose sur un leader.Quand des financiers prêtent à un entrepreneur ou investissent dans son projet, ils lui demandent de rester à la tête de l’entreprise.
Après il n’y a pas de bon leader s’il n’y a pas de bons seconds. La qualité d’un chef d’entreprise est de savoir s’entourer. Mais chacun a son rôle. Et celui de l’entrepreneur est unique.
L’entrepreneur est aussi celui qui assume les risques financiers de l’entreprise. Celui aussi qui quand tout bascule sait garder son sang-froid pour continuer à regarder vers l’avenir avec confiance et optimisme.
3) Pour vous, qu’est-ce que la création de valeur ?
Dans tout projet entrepreneurial on cherche évidemment la réussite économique. Mais d’après moi la première motivation de l’entrepreneur n’est pas la poursuite du gain. Le gain est le résultat du succès. Et le succès répond à la quête de sens.
Un sens que je trouve dans les différentes dimensions de mon rôle. Dans la conception d’une offre qui répond à une attente du marché, bien entendu.Mais encore plus dans l’accompagnement des hommes. Les valeurs et la culture d’entreprise sont un moteur pour moi.
Le chef d’entreprise est un généraliste dont le succès dépend de sa capacité à s’entourer des bons spécialistes qui partagent les mêmes valeurs que lui. L’entreprise est une expérience commune dans laquelle chacun créée de la valeur.
Mes collaborateurs apportent leurs compétences et leur envie au service d’une vision commune.En tant que chef d’entreprise j’apporte une vision, mon enthousiasme, mon expérience, mon leadership. Mon rôle en tant que leader est de créer une culture d’entreprise dans laquelle nous pouvons tous nous reconnaître.
C’est finalement cette alchimie qui conditionne le succès et la création de valeur. La valeur financière mais aussi la valeur humaine dans l’engagement, la responsabilité, l’excitation, la fierté du travail bien fait, le bonheur de faire ce que l’on fait, le sens commun.
4) Quelles sont les trois ou quatre mesures à prendre pour améliorer le développement des entreprises françaises ?
a/ Simplifier les procédures
Les « volontés » politiques affichées régulièrement dans les médias ne sont que des effets d’annonce. Il faut alléger et simplifier pour éviter aux entreprises d’avoir à se débattre en permanence dans cette complexité insupportable.
b/ Rapprocher le Politique de l’Entreprise
Il faut réduire ce fossé qui conduit trop souvent les politiques dans leur gestion de la Cité à ignorer les mécanismes économiques de base et à prendre des décisions qui vont à l’encontre du développement des entreprises. De simples mesures modifiant les schémas de circulation urbaine par exemple peuvent conduire un quartier entier de commerçants et d’affaires à la faillite.
c/ Revaloriser la valeur travail et l’entreprise
Ce serait une bonne idée dans notre société de remettre la valeur du travail de l’entrepreneur à sa place. Que l’on reconnaissance le risque qu’il prend, le travail qu’il fournit, et sa contribution dans la création de richesses dont tout le monde bénéficie, telles que les emplois créés, les impôts et les taxes versés, les compétences partagées.