Analyse économique
octobre 2014
Peut-on parler de rigueur budgétaire en France ?
Rigueur ou austérité?
Que l’on considère la première comme la panacée ou la seconde comme la source de tous les maux, les deux termes ont une charge émotionnelle que les acteurs de la vie politique française aiment à convoquer. Le mot de rigueur renvoie à l’idée d’une saine gestion, sans dépenses excessives, mais ne parle-t-on pas également d’un hiver rigoureux ? Aux dires de Jean-Marc Ayrault, il y aurait même une bonne et une mauvaise rigueur. Avec l’austérité, l’ambivalence disparaît et le Père la Rigueur se transforme en Père Fouettard . L’ascèse destinée à gagner le salut budgétaire n’est pas bien loin….Bref si la rigueur inquiète un peu, l’austérité fait franchement peur.
Derrière les louanges ou les imprécations, il y a une réalité : celle des chiffres. Nous proposons de la présenter ici, afin de faire le point sur l’évolution des soldes budgétaires en France par rapport aux autres pays européens.
Dans les tableaux suivants, nous comparons ainsi l’évolution en France à la moyenne de l’Union Européenne, à l’Allemagne, aux pays périphériques hors Grèce ainsi qu’au Royaume-Uni, qui a également mis en œuvre un plan de réduction des déficits. Pour mieux faire ressortir les tendances, nous avons pris la moyenne sur deux ans des périodes suivantes: 2003-2004, 2006-2007, 2009-2010 et 2013-2014. Nous soulignons en vert les variations qui soutiennent la croissance et en rouge celles qui la pénalisent.
Dépenses structurelles des administrations publiques en pourcentage du PIB potentiel |
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2003-2004 | Variation | 2006-2007 | Variation | 2009-10 | Variation | 2013-14 | |||||
France | 51,5 | 0,5 | 52,0 | 0,9 | 53,0 | – 0,0 | 52,9 | ||||
Allemagne | 43,8 | – 1,6 | 42,2 | 1,0 | 43,2 | – 1,2 | 42,0 | ||||
Italie | 43,5 | 0,9 | 44,4 | 0,8 | 45,2 | – 1,9 | 43,3 | ||||
Espagne | 36,9 | 1,6 | 38,5 | 3,7 | 42,2 | – 5,1 | 37,1 | ||||
Portugal | 42,2 | – 0,0 | 42,2 | 3,3 | 45,5 | – 4,4 | 41,1 | ||||
Irlande | 32,1 | 4,3 | 36,3 | 4,6 | 40,9 | – 4,5 | 36,5 | ||||
Royaume-Uni | 40,5 | 1,9 | 42,3 | 3,3 | 45,7 | – 3,1 | 42,5 | ||||
Union européenne | 43,9 | 0,4 | 44,4 | 1,9 | 46,2 | – 1,8 | 44,4 | ||||
Source: Commission Européenne |
Recettes structurelles des administrations publiques en pourcentage du PIB potentiel |
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2003-2004 | Variation | 2006-2007 | Variation | 2009-10 | Variation | 2013-14 | |||||
France | 49,5 | 0,7 | 50,2 | – 0,9 | 49,3 | 3,3 | 52,6 | ||||
Allemagne | 43,7 | 0,1 | 43,8 | 0,5 | 44,3 | 0,3 | 44,6 | ||||
Italie | 42,9 | 2,2 | 45,2 | 0,6 | 45,8 | 1,8 | 47,7 | ||||
Espagne | 38,4 | 2,5 | 40,9 | – 4,7 | 36,2 | 1,7 | 37,9 | ||||
Portugal | 39,0 | 1,9 | 40,9 | – 1,1 | 39,8 | 2,9 | 42,7 | ||||
Irlande | 34,4 | 2,7 | 37,1 | – 3,1 | 34,1 | 1,7 | 35,8 | ||||
Royaume-Uni | 38,8 | 1,9 | 40,6 | – 0,9 | 39,7 | 1,1 | 40,8 | ||||
Union européenne | 43,6 | 1,0 | 44,6 | – 0,6 | 44,0 | 1,4 | 45,4 | ||||
Source: Commission Européenne |
Outre le niveau très élevé des dépenses publiques (et donc des prélèvements obligatoires) par rapport aux autres pays, on remarque que la France a expérimenté depuis 2009-2010 une consolidation budgétaire (variation des dépenses – variation des recettes) de la même ampleur que dans l’ensemble de l’Union Européenne (3,3% du PIB potentiel contre 3,2%). Mais très inférieure à celle effectuée en Espagne, au Portugal, en Irlande et au Royaume-Uni…
Le deuxième élément , sans doute le plus remarquable, est qu’à l’inverse de ce qui s’est fait dans le reste de la zone euro, la totalité de l’effort de réduction du déficit structurel a porté sur l’augmentation des recettes budgétaires.
Part des augmentations de recettes dans l’effort structurel | |||||||||||
France | 100% | ||||||||||
Allemagne | 19% | ||||||||||
Italie | 49% | ||||||||||
Espagne | 25% | ||||||||||
Portugal | 40% | ||||||||||
Irlande | 28% | ||||||||||
Royaume-Uni | 26% | ||||||||||
Union Européenne | 45% | ||||||||||
Source: Commission Européenne |
FRANCE: PRODUIT INTÉRIEUR BRUT
( base 100 en 2000 )
Comme le montre le graphique ci-dessus, cette stabilité de la dépense publique a certes permis de compenser une contraction de la demande privée. A moins que ce ne soit le recours exclusif aux augmentations de recettes qui soit à l’origine de la déprime de cette dernière ?