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avril 2023
« L’économie : il y a peu de sujet sur lequel on se soit plus donné carrière pour déraisonner » (traité 1ère ed.)
La réforme des retraites : ignorance, déni et cynisme.
« Les réformes commencent par la guerre des idées ; elles s’opèrent par le changement des institutions ; elles s’accomplissent et s’établissent définitivement par la paix des idées ».
François Guizot (1838).
Sauver notre système de retraite, c’est pourtant l’idée simple derrière la réforme adoptée qui repose sur des chiffres faciles à comprendre et à expliquer :
• Dans notre système par répartition la proportion entre cotisants et retraités ne cesse de se dégrader : 4,3 actifs par retraité en 1965 contre 1,7 en 2020. L’évolution démographique (hausse de l’espérance de vie et baisse de la natalité) fait peser une charge croissante sur les actifs et sur les entreprises qui contribue au déclin de notre compétitivité et à la faible progression du pouvoir d’achat des travailleurs.
• En effet grâce à ces contributions généreuses pesant sur l’appareil productif, les retraités disposent d’un niveau de vie supérieur au niveau de vie moyen des français (environ 103%) depuis les années 1990. En 1970 le niveau de vie des retraités était de 70% de la moyenne nationale. Le taux de pauvreté (personnes disposant d’un revenu inférieur à 60% du revenu médian) des retraités s’établi à 8% contre 15% pour l’ensemble de la population.
• Cette charge croissante (14% du PIB), plus de 330 mds redistribués par an, n’est pas soutenable : elle se compare mal avec nos voisins (11% du PIB en Allemagne) et l’évolution démographique d’ici 2050 – allongement de l’espérance de vie et stagnation de la population active- rend prohibitif le maintien des paramètres établis il y a 40 ans par des dirigeants aveugles bien que légèrement réformés depuis. La population active va stagner autour de 29 millions, alors que les retraités vont passer de 17 à 23 millions (+35%). Aujourd’hui le taux d’activité des 60-64 ans s’établit seulement à 36%.
À défaut d’une grande réforme systématique lors du premier quinquennat du Président Macron, abandonnée certes mais ayant donné lieu -aurait-on pu penser- a des progrès pédagogiques significatifs sur la matière, le Gouvernement a opté pour une réforme paramétrique. Le maintien du système ne peut se faire qu’en activant trois leviers : la durée de cotisation, l’âge de départ (l’ouverture des droits pleins), le montant des pensions versées, en excluant à raison une hausse délétère des cotisations.
Le bon sens des français aurait pu s’imposer à leurs dirigeants politiques et syndicaux et aux médias et les faire exiger une réforme… que tous les pays ont mis en œuvre depuis longtemps.
Âges d’ouverture des droits au 1er janvier 2022 et à terme dans les pays suivis par le COR
Pourtant le décalage est frappant entre la modestie de la réforme et l’opposition qu’elle semble susciter. Le recul de l’exercice des droits de 62 à 64 ans nous met encore loin des pratiques des pays proches. Et plus de la moitié des économies attendues de la mesure semble avoir été réinvestie dans des mesures sociales (minima, pénibilité etc.). Pas de quoi fouetter un chat ! Et on se demande bien pourquoi avoir réduit l’âge envisagé initialement de 65 à 64 ans ! Une vraie réforme aurait dû viser 65 ou 67 ans et concerner aussi le niveau actuel des pensions (avec baisse des charges pour les salariés et les entreprises) qui est trop élevé par rapport à notre faculté contributive et s’accompagner d’un plan de hausse du taux d’activité des 15-24 ans qui est beaucoup trop faible.
Pour comprendre la France éternelle, rappelons la tentative de réforme du gouvernement Laniel en 1953 qui proposait de reculer de 65 à 67 ans l’âge de départ en retraite des fonctionnaires parce que les caisses étaient vides…