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mai 2015
« L’économie : il y a peu de sujet sur lequel on se soit plus donné carrière pour déraisonner » (traité 1ère ed.)
Collé pour enfumage : François Rebsamen, Ministre du Travail, de l’Emploi etc….
« Sur les trois premiers mois de l’année, l’augmentation du nombre de demandeurs d’emploi, a avoisiné 3000 chaque mois en moyenne. Ce rythme de progression est près de quatre fois moins élevé que celui observé en 2014 et le plus faible enregistré depuis début 2011 ».
Voici un nouveau commentaire de M.Rebsamen, sur les chiffres du chômage qui serait amusant si nous n’étions pas troublés par son manque d’honnêteté intellectuelle :
1/ Une baisse de la progression du nombre de demandeurs d’emploi n’est pas équivalente à une baisse du chômage. Il y a eu 15 400 nouveaux demandeurs d’emploi en mars 2015.
2/ Le changement d’un mois sur l’autre des indicateurs utilisés ne changera pas la réalité.
Insee | demandeurs d’emploi (milliers) | variation mensuelle | variation cumulée en 2015 | variation moyenne trimestrielle | différence |
mars-15 | 3509,8 | 15,4 | 9,1 | 3,0 | -16,6 |
févr-15 | 3494,4 | 12,8 | -6,3 | ||
janv-15 | 3481,6 | -19,1 | -19,1 | ||
déc-14 | 3500,7 | 14,3 | 19,6 |
Pour février, était évoqué le chiffre en vert dans le tableau ci-dessus qui indiquait nettement la baisse cumulée du nombre de demandeurs d’emplois sur les deux premiers mois de l’année (-6 300). Or, ce même indicateur, utilisé pour mars, aurait indiqué une hausse cumulée du nombre de demandeurs d’emplois en 2015 de +9 100 et surtout une augmentation très forte (+20%) de la variation en mars vs février. Le Ministre Rebsamen a donc sorti du chapeau un nouvel indicateur (en rouge ci-dessus) qui montre une baisse de l’augmentation moyenne entre le 1er trimestre 2015 et le 4ème trimestre 2014 de -16 600. Belle performance ! Quel sera l’indicateur utilisé le mois prochain ?
Ce jeu enfantin autour des chiffres, qui bien heureusement ne trompe plus personne, s’efforce de cacher une triste réalité qui est celle de l’échec du modèle économique français :
Taux de chômage:
G8 | oct-09 | dec-14 | Diff. |
Etats-Unis | 10,0% | 5,6% | -4,4% |
Royaume-Uni | 7,7% | 5,5% | -2,2% |
France | 9,5% | 10,5% | 1,0% |
Allemagne | 7,7% | 4,9% | -2,8% |
Japon | 5,3% | 3,4% | -1,9% |
Italie | 8,1% | 12,7% | 4,6% |
Canada | 8,4% | 6,7% | -1,7% |
Russie | 7,6% | 5,3% | -2,3% |
Union Européenne | 9,8% | 9,4% | -0,4% |
Si l’on compare les chiffres du chômage français par rapport au G8 et à l’Union Européenne entre octobre 2009 -point haut du chômage aux Etats-Unis- et décembre 2014, nous nous rendons mieux compte de la médiocrité de notre politique économique qu’aucun enfumage sur les chiffres ne pourra masquer. Le chômage est bien autre chose qu’une donnée statistique. Il a pour conséquence la détresse sociale et la fuite des personnes les mieux éduquées.
Double trahison intellectuelle du Ministre aux économistes de son pays. Loin de l’ambition pédagogique de Jean-Baptiste Say, le Ministre devrait présenter la réalité plutôt que la travestir : le nombre de chômeurs est à son plus haut niveau historique en France. Et s’inspirer, sans idéologie, des solutions au sous-emploi proposées par d’autres grands économistes français contemporains comme Jean Tirole !