Parole d’entrepreneur
novembre 2023
Richard Gaignon – Co-fondateur et Président de 3DCeram
Richard vient du monde ouvrier. Son père était plombier. Un technicien très qualifié et habile mais pas chef d’entreprise. Comme Richard le dit lui-même, rien ne le prédestinait à une carrière d’entrepreneur. Alors que son père le voit déjà suivre ses traces, sa mère voit son potentiel et l’oriente d’abord vers un BTS. Ses professeurs de secondaire prennent le relais et le poussent à faire Sup et Spé. Puis ce sont les concours aux grandes écoles d’ingénieurs.
Pas vraiment fondu de techno, il intègre l’École Nationale Supérieure de Céramique Industrielle à Limoges. Richard découvre alors les multiples applications industrielles de la céramique. Avec son DEA en poche il envisage un moment la possibilité de faire une thèse aux USA. Mais il est plus attiré par la gestion de projet industriel et l’ingénierie. Et par les voyages.
Il part en tant que VSN travailler pour CERIC, une société française implantée aux États-Unis. Il y construira sa carrière d’ingénieur pendant 20 ans. Occupant successivement les postes de chef de projet, de responsable R&D, de patron de filiale en Allemagne, puis en France, et enfin DG commercial avec sous sa responsabilité 800 personnes pour €150 millions de chiffre d’affaires. Une vraie belle progression professionnelle dans une société à la culture entrepreneuriale très inspirante.
En 2009, Richard quitte CERIC à la suite d’un changement de gouvernance pour reprendre avec son ami de jeunesse, Christophe Chaput, la société dans laquelle ce dernier travaille alors. La société devient 3DCeram. D’abord spécialisé dans la production traditionnelle des pièces en céramique technique (pressage-injection-coulage), 3DCeram sera parmi les premiers à innover avec la production des pièces par impression 3D avec le procédé de stéréolithographie laser (SLA). L’évolution de son modèle économique l’a conduit aujourd’hui à se spécialiser sur la production des machines elles-mêmes et des consommables – résines et pâtes céramiques.
En 2017 le groupe japonais Sinto, leader mondial de la fonderie, investit dans 3DCeram pour financer son développement et prend la majorité du capital, aux côtés de ses deux fondateurs toujours aux manettes.
Avec une équipe de 30 personnes la société réalise un chiffre d’affaires de €6 millions en progression constante, dont 85% à l’export.
1) Pourquoi être devenu entrepreneur ?
D’une part je ne trouvais plus dans mon job les challenges et l’émulation qui m’avaient porté jusque-là. Je souhaitais reprendre le contrôle de ma destinée. D’autre part j’ai un problème avec l’autorité et j’ai besoin de liberté. La liberté de faire mes choix, de gérer mon business, de faire mes erreurs et de les assumer. J’avais l’expérience requise pour me lancer et la perspective de me lancer à deux, avec Christophe et une vraie complémentarité entre nous, a fait pencher la balance. La baisse substantielle de mes revenus et le risque lié à la nouveauté totale de l’impression 3D à l’époque ne m’ont pas découragé. J’étais prêt.
2) Le chef d’entreprise est-il le seul à entreprendre ?
L’entrepreneur est un genre particulier. Il doit avoir une vision et vraie énergie pour entreprendre. Au top de la pyramide il doit traiter les problèmes que les autres ne sont pas capables de traiter. Ça demande une forte résilience. Être capable de se projeter, de résister, d’accepter les difficultés et les erreurs, et d’accepter le risque bien sûr.
Dans notre entreprise nous essayons de donner les moyens à tous d’entreprendre, dans un cadre déterminé. De les motiver en leur confiant des responsabilités permettant de trouver du sens en faisant une vraie différence. De leur donner envie.
3) Pour vous, qu’est-ce que la création de valeur ?
Pour moi la première création de valeur est de transformer l’innovation en activité rentable. Une activité qui puisse nous porter financièrement de manière durable. C’est aussi de développer notre réputation et notre notoriété en tant que pionnier et leader de notre industrie. Et de faire tout ça ensemble dans le plaisir avec une équipe que l’on est content de retrouver.
4) Quelles sont les trois ou quatre mesures à prendre pour améliorer
le développement des entreprises françaises ?
a/ Faciliter l’accès au financement des petites structures sur des petits tickets de l’ordre du million d’euros en laissant le contrôle du capital aux fondateurs.
b/ Rendre les brevets et la protection de la propriété intellectuelle plus abordables pour les start-ups et les petites entreprises innovantes qui n’ont souvent pas les moyens de protéger cet actif stratégique et valorisant.
c/ Sensibiliser les entreprises à l’importance de leur marque employeur et l’importance d’investir suffisamment dans le recrutement des talents.