Analyse économique
mars 2023
Comment augmenter réellement les salaires ?
La poussée actuelle d’inflation entraine des appels nombreux à augmenter les salaires, afin de préserver le pouvoir d’achat des ménages. Pour que ce pouvoir d’achat augmente, il faut que les salaires progressent au-delà de l’inflation.
Dans leur jargon, les économistes font souvent l’opposition entre le réel et le nominal. Dans le cas des salaires, le salaire nominal, c’est celui que l’on observe chaque mois sur la fiche de paie, son montant exprimé en euros courants. Mais la perte de pouvoir d’achat de la monnaie liée à l’inflation fait qu’un salaire de 2000 euros aujourd’hui permet d’acheter moins de choses qu’un salaire de 2000 euros il y a dix ans. Autrement dit, si l’on trouvait le moyen d’additionner les choux et les carottes avec les téléviseurs et les soins de santé pour définir une unité de consommation, le nombre d’unités de consommation acheté par ces 2000 euros a diminué sur la période. Le salaire réel, c’est ce salaire nominal exprimé en unités de consommation. Ce salaire réel est en général calculé en divisant le salaire nominal par l’indice des prix et on dit que le salaire réel est de x euros aux prix de l’année de référence.
La croissance moyenne du salaire réel dans l’économie dépend de trois facteurs :
• La croissance réelle de l’économie, elle-même dépendante de la croissance du nombre d’heures travaillées et de la productivité ;
• Le partage de la valeur ajoutée ;
• La manière dont la partie rémunérant le travail est répartie entre le salaire proprement dit et les contributions sociales.
Ces différents facteurs peuvent avoir un impact, mais tendanciellement, c’est la croissance de la productivité qui explique l’essentiel de la croissance réelle des salaires. En effet, le partage de la valeur ajoutée est en général relativement stable. Généralement, car on note certaines divergences, comme aux États-Unis où l’on observe effectivement une baisse progressive de la part travail de la valeur ajoutée depuis une trentaine d’années. Mais si l’on prend un pays comme la France, celle-ci est très stable autour de 62%.
Comme le montre le graphique ci-dessous, sur des données américaines de long terme moyennées sur cinq ans, la croissance des salaires réels reste très corrélée à la croissance
de la productivité.
Croissance moyenne sur cinq ans de la productivité et des salaires
Dans le contexte actuel, on observe une forte progression de l’emploi et donc du nombre d’heures travaillées qui ne s’accompagne pas forcément d’une accélération de la croissance,
au-delà des effets liés à la réouverture Post-Covid.
Autrement dit, la croissance de la productivité post-Covid est décevante, ce qui pourrait limiter la croissance tendancielle des salaires réels sur les prochaines années.