Parole d’entrepreneur

mars 2022

Claire Leblond Faure – Fondatrice de Debongout

www.debongout-paris.com

Une entrepreneure à la forme active.

Claire grandit à Rillieux-la-Pape dans la banlieue de Lyon.
Le budget familial est « serré ». Son père périgourdin charismatique et entrepreneur à répétition ne rencontrera le succès que tardivement. Sa mère libyenne doit commencer à travailler à cinquante ans pour assurer les arrières de la famille.

Claire apprend très tôt à prendre son destin en main.
Premier objectif : faire ces études supérieures qui doivent lui permettre de saisir sa chance et lui assurer autonomie et sécurité.

Elle obtient un master 2 en droit des médias. Claire passe d’un petit job à un autre pour financer ses études. Mannequin et ancienne Miss Rhône, présentatrice TV sur Energie12, elle développe une petite notoriété en 2010/2011. Au même moment FaceBook et les réseaux sociaux émergent. Alors que la maîtrise de l’image sur le web devient un véritable enjeu, Claire envisage de faire un doctorat sur le sujet de la diffamation sur Internet. Mais arrivée en fin de master 2 l’idée de passer son temps à faire de la doctrine ne l’enchante pas vraiment…

Une fois encore Claire prend les choses en main et décide de se tourner vers l’entrepreneuriat pour créer son propre job.

En 2010, elle se pose la question : est-ce que la communication des entreprises a su s’adapter à ce nouvel espace de parole qu’est Internet ?
Elle répond en montant sa boîte pour leur proposer de transposer leur communication vers les réseaux sociaux.

Claire n’a que 23 ans. Elle ne sait pas vraiment dans quoi elle se lance. Pour elle un BP est une station service. La TVA ou l’URSSAF, des concepts inconnus. Au détour d’une conversation lors d’un diner du samedi soir entre amis, l’un d’eux, patron d’une agence de com’ clermontoise, lui propose de présenter son offre à ses clients dès le lundi matin.

Claire saute sur l’opportunité. Deux jours plus tard elle est face à son premier client, le Centre commercial Jaude à Clermont-Ferrand. 2 ans plus tard son entreprise compte 14 salariés et réalise 1 million d’euros de chiffre d’affaires, et parmi ses clients : Klepierre, Renault, Coca-Cola…

Une première aventure qui durera 4 ans, avec la création de bureaux à Clermont, où elle s’installe pendant deux ans en laissant derrière elle les paillettes de Miss Rhône et les projecteurs des studio télé. D’autres bureaux suivent à Lyon et à Paris.

Une première « création par nécessité » comme la qualifie Claire, dont le virage dans le data mining marquera son passage à une autre expérience plus « réelle ». Les trois années suivantes, Claire devient la « padawan » d’Olivier Aubert, fondateur de l’agence de pub éponyme, créateur de sagas emblématiques pour Les Galeries Lafayette, MMA, MAF, ou LCL.

Claire apprend l’approche très pragmatique d’Olivier Aubert de « …la pub pour faire vendre, pas de la pub paillettes pour gagner des prix à Cannes ».
En avril 2019, Claire quitte la pub et revient à l’entrepreneuriat en créant
Debongout, challenger et disrupteur du secteur de la déco intérieure. L’entreprise multiplie son chiffre d’affaires par quatre chaque année depuis 3 ans, avec une dizaine de personnes.

1) Pourquoi être (re)devenue entrepreneure  ?

J’avais bien profité de mon expérience chez Aubert-Storch. Un job sympa et bien payé mais je m’ennuyais un peu. Je devais passer à autre chose. Je ne pensais pas revenir à la création d’entreprise, avec ses ups & downs, ses aléas, ses risques. J’avais plutôt en tête un job « stable » avec un bon salaire…

Mais je pense qu’au fond de moi j’ai besoin de prendre et de garder la main.
C’est à l’occasion de notre emménagement dans notre nouvel appartement que cette nouvelle idée germe et finit par me posséder : Proposer une offre d’ameublement et de déco intérieure
« tendance », écoresponsable et abordable, associant des pièces uniques, neuves et chinées. Les encouragements et le soutien de mon entourage proche ont fini par me convaincre de me lancer… à nouveau.

2) Le chef d’entreprise est-il le seul à entreprendre ?

Le chef d’entreprise a un rôle unique. C’est le capitaine du bateau, il a une vision et il doit emmener ses troupes avec lui. Il doit porter son projet avec cohérence.

En même temps, en tant qu’entrepreneur, je suis consciente que je ne sais pas faire certaines choses. Donc l’objectif est de savoir bien m’entourer des gens qui ont ces compétences. Je n’ai pas embauché de junior. J’ai préféré investir au départ sur des profils expérimentés sur des métiers spécifiques décisifs dans le succès de l’entreprise : la gestion des flux, la logistique, le branding. Tout est à écrire pour notre entreprise, avec un positionnement de challenger et de disrupteur dans un secteur où les positions sont établies. Chaque collaborateur dans son périmètre respectif doit donc être un entrepreneur. Ce sont tous des intrapreneurs. Nous bâtissons cette entreprise ensemble.

En tant que capitaine je donne le cap. Je mets en place les financements et la gestion de la boîte. Et puis il y a un peu de folie dans tout ça. Et en tant qu’entrepreneur, je suis celle qui en assume le risque.

3) Pour vous, qu’est-ce que la création de valeur ?

Chez Debongout on crée de la valeur de plusieurs façons.

Avec les produits neufs, on valorise le savoir-faire de nos fabricants, de nos artisans. On travaille sur un modèle de précommande en gérant nos consommables et nos matières au plus près.
Avec la brocante, on offre une seconde vie aux objets, on répare, dans une démarche claire d’écoresponsabilité.

Pour le client, on crée de la valeur en faisant notre métier consistant à créer, identifier et sélectionner les pièces uniques que nous lui proposons, et sur lesquelles nous lui offrons des garanties.

On crée aussi de la valeur lorsqu’on permet à nos collaborateurs d’horizons et de parcours différents de s’épanouir en travaillant et en construisant ensemble, lorsqu’on crée l’envie et que l’on produit cette énergie unique.

Enfant je rêvais d’être riche pour être heureuse. Quand j’ai commencé à bien gagner ma vie j’ai réalisé que ça n’était pas ce qui me rendrait heureuse. Bien gagner sa vie n’est qu’une des composantes de l’épanouissement. J’ai des objectifs de performance et des objectifs de valorisation pour mon entreprise. Mais la création de valeur financière n’est pas tout.

Et puis travailler sur notre modèle de volume sur de la pièce unique est un challenge business et intellectuel permanent lui-même créateur de valeur.

4) Quelles sont les trois ou quatre mesures à prendre pour améliorer
le développement des entreprises françaises ?

a/ Revaloriser les métiers manuels.
Dans notre métier on adorerait avoir plus de menuisiers, plus de couturiers, de gens qui savent faire. Cela créerait un marché, avec des prix plus abordables. Aujourd’hui nous sommes coincés entre le tarif local de l’excellence et la délocalisation. Il n’y a rien au milieu. Le Portugal a compris cet enjeu en se développant énormément grâce à la promotion de ces métiers de savoir-faire.

b/ Recréer les filières industrielles.
Les crises sanitaire et géopolitique sont là pour nous rappeler amèrement la disparition de nos filières et l’importance de recréer une industrie plus proche.

c/ Fluidifier le marché de l’emploi.
Un salarié coûte très cher en France. Les règles de début et de fin de contrat sont encore trop rigides. Tout cela constitue des freins réels à l’embauche.