Au fil des lectures : reçu 10/10
décembre 2020
« Une vérité appartient, non pas au premier qui la dit, mais au premier qui la prouve. » (traité 1ère ed.)
Le Capitalisme est-il moral ?
André Comte-Sponville.
Publié en 2004 et issu d’une conférence lui donnant une grande facilité de lecture, ce bref essai a gardé toute son actualité, et semble même prendre encore plus d’acuité aujourd’hui.
D’abord parce Comte-Sponville développe une analyse du retour de la morale dans l’ordre social. Ce retour s’est amplifié voire généralisé depuis 15 ans et tout sujet politique, économique ou de société est aujourd’hui d’abord traité par une « opinion morale » façonnée par les groupes d’intérêts ou de pression qui s’en prévalent.
Ensuite, la pandémie a soulevé de nombreux appels à un nouveau capitalisme, un « nouveau monde » qui trouverait dans le passé les solutions pour aujourd’hui et demain. La Covid 19 étant une punition ou un avertissement pour nos fautes générées par notre prospérité.
Mais le capitalisme n’est qu’une organisation de l’économie qui a fait ses preuves depuis deux siècles pour sortir l’humanité de la misère et l’amener en nombre à une vie longue et prospère. Toujours très (trop) nombreux sont ceux qui y aspirent. Ceux qui prétendent vouloir y renoncer sont ceux qui en profitent depuis le plus longtemps, sans pourtant, par leurs comportements individuels ou collectifs, agir vraiment pour en réduire ou supprimer les externalités négatives (réchauffement, environnement).
Sans volonté ni conscience, l’économie ne peut-être morale. Cela n’exclut pas qu’il puisse y avoir une morale dans une société capitaliste, mais elle doit venir d’ailleurs. Et une première distinction serait à faire entre richesse et capitalisme. Un riche qui n’investit pas n’est pas un capitaliste ; le capitalisme pour exister et survivre suppose l’accumulation du capital : toute richesse créée est destinée (par l’investissement) à en créer d’autres. C’est la convergence (et non le conflit) des intérêts -via le marché- qui permet au système capitaliste de fonctionner, et s’en priver serait se priver de notre prospérité. Ce qui serait sans doute immoral, car volontairement cruel et injuste pour les plus faibles et les plus démunis. L’auteur en appelle plutôt à une éthique de la responsabilité qui ne peut être que du seul ressort des individus.