Au fil des lectures : reçu 10/10
décembre 2019
« Une vérité appartient, non pas au premier qui la dit, mais au premier qui la prouve. » (traité 1ère ed.)
André Lévy-Lang. La Révolution de la finance : acte II. Odile Jacob
Fidèle à l’esprit de Jean-Baptiste Say, André Lévy-Lang, polytechnicien, ancien président de Paribas et président des « Echos », se fait pédagogue bien davantage que démonstrateur dans cet essai clair et simple sur une matière complexe.
Il identifie un premier acte de la finance qui va de la fin de la convertibilité du dollar (et sa dévaluation conséquente) en 1971 à la crise financière de 2007-2008. Avec des institutions et un système de confiance qui explose, la technique financière débridée, plus que la technologie, et des règlementations et des régulateurs dépassés voire complices, un nouvel ordre s’impose. A force d’interventions, de nouvelles réglementations, la confiance est revenue dans le système.
L’acte 2 s’ouvre avec de nouveaux acteurs : internet et la mobilité permettent l’émergence de nouveaux systèmes de confiance qui peuvent être des vecteurs de la finance et de ses différents services. L’auteur prend la peine de présenter précisément les grands et moins grands acteurs, qu’ils soient américains (GAFAM), chinois (BATX) ou européens et de nous expliquer leurs « business models », leurs différences et les différences de leur environnement réglementaire. On découvre ainsi l’absence de réglementation sur les données personnelles en Chine et le développement de la filiale d’Alibaba, Antfinancial, dans l’ensemble des services financiers : du paiement à l’épargne, à l’assurance et au « scoring » etc.
André Lévy-Lang instruit aussi son lecteur sur toutes les formes émergentes d’acteurs de la finance : les fintechs qui offrent des solutions aux professionnels ou aux particuliers, les néobanques qui assurent le paiement mais qui proposent aussi épargne et assurance, les
« robot advisors etc ». Sur le pétrole des données, la différence se joue sur la collecte,
la maîtrise et l’usage de celles-ci, donc dans le logiciel bien davantage que dans le matériel.
Et nombreux sont les projets qui s’en nourrissent : crypto monnaies, monnaies (Libra), accord Goldman Sachs Apple, et ambitions pas encore formulées des autres Gafam de prendre une part du marché.
Pourtant la confiance sur les grands sujets a besoin d’être incarnée : si les petites opérations sans risques pour les clients peuvent se faire sur internet, les opérations importantes de la vie engageant des sommes importantes convoquent une forme de prudence ou de conservatisme. Aux exigences réglementaires nouvelles de connaissance client (KYC, « know your customer ») semble répondre un besoin (et un plaisir ?) ancien de « know your banker ». Aux institutions financières traditionnelles de l’imposer dans l’économie de l’internet pour survire. Et de ne pas subir seulement la méfiance et la lourdeur de la réglementation qui touchera aussi les nouveaux acteurs.