Il nous l'avait bien dit
mai 2018
La bonne instruction de tous au service de la prospérité
Notre premier Baromètre Jean-Baptiste Say, présenté dans notre chapitre « économie » du mois, confirme la soif de connaissance des Français et leur très faible éducation dans cette matière qui décide pourtant du niveau et de l’évolution de notre prospérité collective et individuelle.
Avec son utopie « Olbie », Say répond en 1799 à un sujet de prix donné par l’Institut : « quels sont les moyens de fonder la morale chez un peuple ? ». Relisant son œuvre de jeunesse, l’auteur écrivit ces quelques réflexions :
« Si je refaisais mon Olbie, je la placerais sur une tout autre base. Je ferais voir que la morale des nations dépend du degré de leur instruction.
L’instruction consiste à se former des idées justes de la nature des choses, à ne voir dans chaque objet que ce qui s’y trouve réellement. On est d’autant plus instruit qu’il y a plus de choses qu’on connaît bien.
De la connaissance positive de la nature des choses dépend la connaissance de nos vrais intérêts, et de la connaissance de nos vrais intérêts, la perfection de l’art social. Lors donc qu’on veut traiter de l’art social sans remonter plus haut, on dresse un arbre sans racines, on crée une utopie, une rêverie plus ou moins ingénieuse.
Les siècles qu’on dit éclairés l’ont été fort peu. Des lumières très imparfaites étaient dans un petit nombre de têtes, dans un Socrate, un Xénophon, un Cicéron, et encore combien n’étaient-elles pas incomplètes ; combien avaient-ils peu d’idées justes en tout genre, en géographie, en physique, en économie politique ? Tout le reste était plongé dans la plus crasse ignorance, ou, ce qui est pire, dans les plus dangereux préjugés.
Il n’est pas nécessaire pour qu’une nation soit ce que j’appelle éclairée, qu’elle soit composée de savants. Il suffit que chaque personne ait une juste idée des choses avec lesquelles elle est en rapport. »
Mélanges de morale et politique in Œuvres Diverses chez Guillaumin 1848.